Dynamique du réseau trophique

Comprendre les interactions entre les espèces afin de mettre sur pied des approches de la gestion des pêches fondées sur l’écosystème

Il est fondamental de mieux comprendre la structure et la dynamique des écosystèmes pélagiques pour mettre sur pied des approches de la gestion des pêches fondées sur l’écosystème. Cette compréhension nous permet d’évaluer les répercussions des activités halieutiques et des facteurs environnementaux sur les stocks ciblés, mais également sur toutes les autres espèces, notamment les prises accessoires et les espèces protégées appartenant au même écosystème.

La structure de l’écosystème est bâtie autour des relations proie/prédateur, qui sont les interactions les plus importantes entre les espèces. L’étude de ces interactions, ou de la dynamique trophique (qui mange qui, où et quand), nous permet de tracer des modèles d’écosystème. Ces modèles servent de base pour mettre à l’essai les différentes options de gestion fondée sur l’écosystème et donner des conseils de gestion et de suivi à la WCPFC et aux petits États insulaires en développement du Pacifique. Ces informations nous permettent de comprendre et de prévoir les changements au sein de l’écosystème imputables à la variabilité environnementale (par exemple, El Niño) et aux pêcheries. Il s’agit par conséquent d’un outil important pour tester et évaluer l’impact de la réglementation de la gestion des pêches sur l’ensemble de l’écosystème.

 

Diagram of the pelagic ecosystem

Qu’est-ce que le réseau trophique pélagique ?

Les thons sont les prédateurs supérieurs du réseau trophique pélagique, en compagnie d’autres espèces comme les requins et les poissons à rostre. Ils consomment des prédateurs plus petits, en particulier du micronecton, composé de petits animaux marins comme des calmars, des crustacés et des organismes gélatineux (entre 2 et 20 cm). Si le micronecton n’est pas ciblé par la pêche, il est central pour le réseau trophique dans la mesure où il constitue la nourriture de l’ensemble des prédateurs supérieurs. Les animaux composant le micronecton dépendent des niveaux inférieurs du réseau trophique comme le zooplancton et le phytoplancton.

Comment étudions-nous le réseau trophique pélagique ?

Nous avons mis sur pied plusieurs approches pour étudier le réseau et les dynamiques trophiques ; l’objectif est de comprendre et de visualiser le flux de nutriments et d’énergie, ainsi que les interactions entre les espèces au sein de ces écosystèmes. Ces mécanismes sont essentiels pour une gestion des pêches fondée sur l’écosystème afin que nous soyons en mesure d’optimiser les stocks de poissons et de protéger d’autres espèces des répercussions de la pêche.

En étudiant le contenu de l’estomac des thons et d’autres prédateurs, nous sommes en mesure de déterminer sur le plan quantitatif et qualitatif les relations proie/prédateur entre l’ensemble des composantes ou espèces de l’écosystème. Cette analyse peut également donner des informations sur la diversité des espèces présentes dans l’écosystème. Après examen de la morphologie (la forme) des éléments contenus dans l’estomac, ainsi qu’après analyse de l’ADN et comparaison avec les bibliothèques de référence pour mettre en correspondance cet ADN avec celui des espèces les plus proches, nous sommes en mesure d’identifier la proie. Nous pouvons ainsi comprendre la mortalité naturelle au sein des populations de poissons, qui a une grande influence sur la dynamique des stocks.

Nous utilisons d’autres méthodes complémentaires pour obtenir davantage de détails sur le régime alimentaire, le niveau trophique et l’habitat de ces animaux ; nous mesurons par exemple les niveaux des isotopes stables de l’azote et du carbone dans les tissus musculaires des poissons. Cela nous permet d’en savoir un peu plus sur les habitudes alimentaires à plus long terme du poisson, dans la mesure où ces éléments s’accumulent dans les tissus au fil du temps, alors que le contenu de l’estomac donne des renseignements sur le dernier repas. De la même façon, le micronecton peut également être recueilli dans des filets de pêche spéciaux afin d’être examiné et défini dans les laboratoires de la Division FAME. En plus de l’analyse du contenu de l’estomac, nous obtenons ainsi davantage de détails sur le réseau trophique pélagique.

Depuis 2000, la CPS a mis en place un grand programme d’échantillonnage afin de recueillir des estomacs et du tissu de poissons de toute la région avec l’appui des programmes nationaux d’observation et d’échantillonnage au port des États et Territoires océaniens. Les observateurs prélèvent des échantillons biologiques à bord des thoniers et les chargés de l’échantillonnage au port collectent des échantillons à terre, dans les installations de déchargement et les conserveries. Les scientifiques prélèvent également des échantillons lors des missions de marquage des thons. Les échantillons sont conservés congelés et envoyés à la CPS accompagnés des données identifiant l’espèce échantillonnée et la zone de prélèvement. Ces échantillons sont conservés dans la Banque d’échantillons marins du Pacifique.