Lettre d'information sur les pêches n°137 (Janvier-Avril 2012)

Éditorial

La collecte de données fiables sur les prises et l’effort de pêche constitue l’une des plus grandes difficultés auxquelles se heurtent les gestionnaires des pêcheries côtières. Des chercheurs de Moorea (Polynésie française) s’efforcent d’évaluer la production halieutique totale des pêcheries récifo-lagonaires depuis 1985. Dans leur article, Leenhardt et ses collègues comparent les résultats de cinq études réalisées à l’aide de deux méthodes distinctes : le suivi des captures et les enquêtes de consommation. Il est surprenant de constater que ces deux méthodes ont donné des résultats radicalement différents : les chiffres de production halieutique obtenus à partir des enquêtes menées auprès des ménages sont presque dix fois supérieurs à ceux obtenus grâce au suivi des captures. En conclusion, les auteurs estiment que les résultats des enquêtes sur la consommation des ménages sont les plus fiables.

Bien avant que les gestionnaires des pêches océaniens ne commencent à étudier les populations de poissons et la consommation des ménages, les pêcheurs de la région Indo-Pacifique parcouraient la mer en vue de capturer des espèces pélagiques, très probablement depuis des embarcations. Des archéologues travaillant au Timor-Leste ont récemment découvert une grotte renfermant des restes de thon et de requin vieux de
42 000 ans, qui ont, de toute évidence, été ramenés à terre par l’homme. Cette découverte archéologique fascinante soulève des interrogations intéressantes sur les prémices de la navigation en haute mer. Elle doit également nous inciter à nous demander si nos pratiques de pêche actuelles permettront à nos lointains descendants de trouver du poisson… dans 42 000 ans !

La question de savoir si les pratiques de pêche sont oui ou non destructrices est d’ailleurs soulevée par Tim Adams, qui examine les avantages et les inconvénients des dispositifs de concentration de poissons (DCP). Il constate que les DCP ne sont, de par leur nature, ni « bons » ni « mauvais ». En fait, un engin devient « destructeur » dès l’instant où les pêcheurs sont trop nombreux à l’utiliser, sa taille est démesurée par rapport à celle du stock ciblé ou si le stock est déjà affaibli par des facteurs sans rapport avec la pêche.