Comprendre de quelle façon les contaminants marins se déplacent dans le réseau trophique pour renforcer les connaissances relatives au comportement et à la biologie des poissons, et pour étayer les décisions en matière de sécurité sanitaire des aliments
Les prédateurs marins comme les thons se situent au sommet du réseau trophique, avec des cycles de vie relativement longs. Ces espèces sont particulièrement exposées aux contaminants chimiques comme le mercure (d’origine naturelle ou anthropique), aux particules de plastique, aux polluants organiques persistants (POP) comme les pesticides utilisés en agriculture conventionnelle, ainsi qu’à d’autres substances. Tous ces contaminants s’accumulent dans la masse grasse des organismes ; leur concentration augmente à mesure qu’on escalade la chaîne alimentaire, des espèces les plus petites aux plus grandes. Ils peuvent également être utilisés comme traceurs afin de mieux comprendre la biologie et le comportement des prédateurs supérieurs.
Les POP ne se dégradent pas et restent dans l’environnement. Ils pénètrent dans le système hydrique par les canalisations d’eaux usées ou par les eaux de ruissellement, par exemple, et finissent dans la mer. Ces polluants peuvent être transportés sur de longues distances. Une fois dans l’eau, ils peuvent être ingérés par des organismes au sein desquels ils s’accumulent sans être éliminés. Cette accumulation de POP dans un organisme peut avoir des effets toxiques et altérer le système reproductif ou le système nerveux, par exemple.
Les plastiques sont devenus très abondants dans tous les océans en raison de leur utilisation intensive par les populations humaines et de l’absence de gestion adaptée des déchets. Les déchets plastiques dans les océans sont composés de macroplastiques, par exemple des bouteilles et des sachets, ainsi que de microplastiques (< 5 mm) issus de la fragmentation des macroplastiques. En outre, des additifs comme les phtalates et le bisphénol A sont incorporés dans les plastiques au moment de leur fabrication afin de leur donner des propriétés particulières (couleur, résistance à la chaleur, etc.). Ces additifs, qui représentent plus de la moitié du poids du plastique, sont toxiques et peuvent se disperser dans l’environnement ou dans les organismes ayant consommé des plastiques flottants en cherchant à se nourrir.
Le mercure est émis dans l’atmosphère par des sources naturelles comme les volcans, mais également en bien plus grande quantité par des activités humaines comme la combustion de charbon et de combustibles fossiles, les déchets industriels et le petit orpaillage. Le mercure présent sous forme gazeuse dans l’atmosphère se dépose progressivement dans les océans en se dissolvant dans l’eau, sous forme de méthylmercure. Cette substance est hautement biodisponible pour ingestion et fixation par les organismes constituant la base du réseau trophique. Sa concentration augmente naturellement, par accumulation, car elle n’est éliminée qu’en très petites quantités par les organismes, depuis les tout premiers niveaux du réseau trophique (plancton) jusqu’aux prédateurs supérieurs (thons et requins), qui contiennent les niveaux les plus élevés de méthlymercure.
La consommation de produits de la mer est la principale voie d’exposition des humains à des contaminants comme le mercure et les POP. Dans une région comme le Pacifique, où de nombreuses populations dépendent des produits de la mer pour se nourrir, il faut comprendre les conséquences de ces phénomènes sur la santé humaine.
En s’appuyant sur des échantillons de la Banque d’échantillons marins du Pacifique, les recherches portant sur différents contaminants peuvent être menées de façon diachronique et sur de grandes zones géographiques afin de découvrir les débuts de la contamination, le cas échéant, et sa distribution dans l’espace. Il est essentiel d’acquérir ces connaissances pour prendre des décisions en matière de sécurité sanitaire des aliments au bénéfice des populations océaniennes.