Lettre d'information sur les pêches n°161 (Janvier–Avril 2020)

Éditorial

Il y a quelques années, alors que nous étions abrités dans un mouillage sûr, à l’écoute de la tempête qui approchait, la foudre a frappé notre bateau. Un éclair blanc a traversé la cabine et toutes les lumières se sont éteintes. Une fois le choc des premières secondes passé, nous avons fait l’inventaire des dégâts. Le réseau électrique et l’électronique du bord étaient hors service, mais le gréement semblait en bon état et la coque ne prenait pas l’eau, bien que marquée de quelques brûlures. En fait, une fois le bateau de retour au port et en cale sèche, il nous faudra des semaines pour identifier et réparer les innombrables conséquences de cet incident, car la foudre avait frappé les recoins les plus inaccessibles du bateau. Nous avons même découvert deux petits trous dans la coque, à la hauteur de la ligne de flottaison, par lesquels la foudre s’était dispersée dans l’océan.

De même, il faudra des mois, voire des années, pour identifier les innombrables conséquences de la pandémie de COVID-19 qui s’étend depuis le début de l’année 2020. D’un point de vue sanitaire, notre région a été relativement épargnée, avec seulement quelques cas, grâce en partie à la fermeture rapide des frontières. Mais ce qui m’a frappé, en lisant les articles de ce numéro sur les impacts possibles du coronavirus sur nos pêcheries, c’est la variété des conséquences possibles ou avérées, et surtout le fait que personne n’est épargné, pas même les communautés côtières isolées qui, malgré tout, dépendent, pour écouler leurs produits, de marchés ruraux qui sont fermés ou de moyens de transport qui sont à l’arrêt (voir les articles de Neville Smith, Francisco Blaha et LLMA et al.).

Une autre conséquence surprenante de la crise a été le retour de nombreux citadins dans leur village d’origine lorsque la forte récession économique a affecté le marché du travail. Des ressources supplémentaires seront nécessaires pour assurer leur sécurité alimentaire. La pression sur les ressources naturelles va donc augmenter. Une gestion saine de ces ressources n’a jamais été aussi importante. Le défi est immense, y faire face prendra du temps, mais la région a souvent montré son incroyable capacité de résilience.

Aymeric Desurmont
Spécialiste de l'information halieutique